A notre glorieux ministre, avec nos compliments

Nous voulons des coquelicots

Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture, n’épinglera pas à sa boutonnière notre cher Coquelicot, car a-t-il dit sur France Culture ce 20 décembre, «[il] n’a pas à arborer de coquelicot». Tant mieux, car il aurait fallu le lui enlever. Que pense notre grand personnage de nous, les 450.000 qui ont déjà rejoint notre Appel? Ceci : «Je me bats toujours contre les intégristes». Ce mot, rappelons-le, a d’abord été utilisé pour désigner les partisans d’un évêque fasciste, Mgr Lefebvre, puis par extension l’intégrisme musulman, pratiquement synonyme de djihadisme. Un ministre de la République rapproche les amoureux de la vie, des oiseaux, des abeilles, de la beauté du monde, du crime. Nous en sommes là.

Bien sûr, et chemin faisant, il ment comme un arracheur de dents, n’hésitant pas à prétendre sans rire: «Moi qui suis un militant du bio. Un militant de la transition agro-écologique». On voit que les éléments de langage fournis clés en mains à tout ministre n’auront pas été perdus. En octobre, le même demandait des preuves de la toxicité des pesticides. C’est fou, le chemin que l’on peut faire en seulement deux mois.

Qui est vraiment Didier Guillaume? Un politicien ordinaire, mais drôle. Au début de l’année, il annonce qu’il arrête tout net sa modeste carrière politique. Il a des vues dans le privé. Et puis il se ravise, pour quelque obscure raison, et se retrouve finalement parachuté ministre d’un domaine qu’il ne connaît pas. Combien de temps restera-t-il ? Six mois, un an, deux? Il sera de toute façon oublié quand les intégristes de service – nous tous, les amis – en seront à fêter la victoire de la vie sur la mort.

Au fait, monsieur Guillaume, et avec tout le respect que l’on doit à votre formidable engagement, pourquoi ne dites-vous pas un mot du ‘lac de Caussade’, dans le Lot-et-Garonne? En ce moment même, passant outre des décisions d’État, la Chambre d’agriculture a ouvert un chantier illégal. Avec des bulls privés et des gros bras locaux. Pour creuser une retenue de 920.000 m3, édifier une digue de 378 mètres de long et 12,5 mètres de haut. Des dizaines d’espèces protégées verront leur habitat local disparaître. Le tout pour complaire à 20 irrigants et au maïs pesticidé.

Et? Et rien. Vous restez là à pérorer, vous le «militant du bio». Nous n’en attendions pas moins de vous.

 

Fabrice Nicolino, président de Nous voulons des coquelicots